Algérie - Pour l’Algérie, il a dit non à la Coupe du monde 1958
Né le 19 octobre 1928 au quartier Notre Dame d’Afrique, sur les hauteurs d’Alger, Mustapha Zitouni a découvert la passion du ballon du côté de Saint Eugène. Exceptionnellement doué, il attire de ce fait l’attention des responsables du célèbre club de l’OMSE (Olympique musulman de Saint Eugène) qui l’engage en 1945.
Il a à peine 17 ans lorsqu’il fait sa première apparrution chez les seniors où les places sont pourtant très chères à négocier. Pétri de qualités, il polit et enrichit son talent d’abord en tant que défenseur latéral où il brille de mille feux et ensuite (après quelques matchs seulement), arrière central où là aussi il s’impose avec maestria. Il n’a pas encore tout à fait bouclé ses vingt ans lorsqu’il est appelé à passer son service militaire au Bataillon de Joinville en France.
Retenu dans la sélection militaire française, il exploite davantage son bagage technique mais aussi son potentiel physique. En 1952, à l’âge de 24 ans, le jeune Algérois du village Marie de Notre Dame d’Afrique, fait partie intégrante de l’équipe française amateurs qui prend part aux jeux Olympiques d’Helsinki (en 1958).
Avec sa grande présence physique et technique, Mustapha Zitouni réalise des prestations de premier ordre qui ne laissent pas indifférents de nombreux clubs de l’Hexagone dont l’AS Cannes plus pompt à la «saisie». Très vite il conquit tout le monde au point de devenir le principal pilier de l’équipe.
Les responsables du club cannois qui lui louent beaucoup de reconnaissance et de respect, ne peuvent tout de même le garder plus d’une saison.
Devenu un joueur très demandé en France mais également à l’étranger, l’élégant ancien défenseur de l’AS Saint Eugène dont la correction de gentleman ne laisse personne indifférent, ne peut rester insensible à l’intérêt soutenu que lui porte l’AS Monaco qu’il a rejoint durant la saison 53/54
Dans ce club phare du championnat de France pourtant constellé de «stars» et où jouent également les Algériens Boubekeur (gardien de but), Bentifour (décédés) et Bekhloufi, Mustapha Zitouni se fond très vite dans le riche effectif et devint même une individualité qui sort nettement du lot.
Durant quatre années (54 à 58), il a su plaire et convaincre. Avec son port altier, son regard périphérique, sa silouhette élégante et sa touche de balle d’orfèvre (il est particulièrement habile balle au pied, pour un défenseur central), il privilégie au grand bonheur des puristes, l’élégance, la beauté et la pureté du geste. Très sobre même dans les situations les plus délicates, il devient un réel charmeur de foules qui le lui rendent bien, lui qui honore au mieux le fair-play et le respect de l’adversaire.
Devenu une star adulée dans les quatre coins de la France, le « pilier» monégasque se voit mettre sur les rangs du célèbre entraîneur de l’équipe tricolore Albert Batteux (qui entraîna également les grandes formations de Reims et de Saint-Etienne) qui le retient pour les éliminatoires de la coupe du monde 1958 en Suède.
Impressionné par l’étendue des possibilités du défenseur de l’équipe du grand Rocher chère au prince Rainier, Albert Batteux n’hésite pas à le titulariser d’emblée malgré la présence du grand Robert Jonquet. Avec sa grande personnalité et sa conscience professionnelle exemplaire, Mustapha Zitouni devient un élément incontournable dans l’échiquier des «Bleus».
Dans ce difficile groupe composé des sélections d’Angleterre, de Belgique, de Hongrie, d’Espagne et de France, il brille au firmament des meilleurs joueurs du groupe.
Avec son importance présence et sa grande régularité, il devient pour son équipe une réelle assurance tous risques. C’est lui qui, lors du dernier et décisif match livré contre la Belgique, évitera à l’équipe de France des Kopa, Fontaine... un but tout fait qui aurait pu lui interdire la participation en phase finale de la CM de Suède.
Malgré sa grande réussite et sa grande aura, il coupera court avec l’équipe de France qualifiée pourtant pour la coupe du monde. Une «fugue» qui le verra rejoindre la glorieuse équipe du FLN basée à Tunis.
Avec les Boubekeur, Bekhloufi, Bentifour (ses coéquipiers à Monaco), Rouaï (Angers), Bouchouk et Brahimi (Toulouse), Mekhloufi (Saint-Etienne), Aribi (Sète), Kermali (Lyon), Maouche, Mahi (Reims), Bouchache (Le Havre), Amara (Bordeaux), Oualiken (Montpellier), Bouricha, Djebaïli (Nîmes), et le responsable Boumezrag, lui-même ancien joueur de Bordeaux, Mustapha Zitouni prend part avec l’équipe à de nombreuses tournées en Europe de l’Est, en Asie et en Afrique du Nord où là aussi et tout comme le reste de l’équipe, il confirme au plus haut point la plénitude de son talent. Il faut rappeler qu’avant de mettre le «cap» sur Tunis, Mustapha Zitouni classé dans la grande lignée des défenseurs centraux de légende a été sérieusement convoité par le Real de Madrid.
Il retournera au bercail dès l’indépendance de l’Algérie. Tout en faisant partie de la sélection nationale drivée par Smaïn Khabatou qui rencontre les équipes de la RFA, l’URSS et la Turquie, il dirige en tant que joueur et entraîneur les équipes de l’OMSE (son ancienne équipe) et du RCK. Il entraîne aussi la formation de Khemis Miliana et de la gendarmerie nationale de 66 à 73 et où évoluaient les Tchalabi, Bougouffa, Madani, Mekidèche...
Après avoir bouclé la boucle en 1973, Mustapha Zitouni se voit confier le poste d’inspecteur commercial à Nice au sein de la compagnie Air Algérie. Il prendra sa retraite professionnelle en 1993. Agé aujourd’hui de 80 ans, Mustapha Zitouni qui n’a pas eu un hommage juste et mérité (hormis un petit jubilé, totalement disproportionné par rapport à sa grande carrière), est malheureusement atteint de la maladie d’Alzheïmer.
Lorsqu’il parle de Mustapha Zitouni, son compagnon de l’équipe du FLN et ex-joueur de Reims, Mohamed Maouche n’est pas avare en compliments.
«C’était un des meilleurs arrières centraux du monde. Il était fort et élégant à la fois. Un grand Monsieur avec un grand M». Kamel Lemoui, qui a connu Mustapha Zitouni en France et en équipe nationale, dira au sujet de ce dernier : «il était un talent d’une valeur inestimable et aurait pu jouer dans n’importe quelle équipe au monde. Il pratiquait un football à l’état pur».
Pour Bachir Lehtihet, l’ex-défenseur de la JSD, du NAHD et de l’EN, qui lui aussi ne tarit pas d’éloges à son sujet. «Mustapha Zitouni avait une classe exceptionnelle et était considéré comme l’un des meilleurs arrières centraux au monde des années 50».
Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com
D'apres Horizons-dz. www.horizons-dz.com. Par Abdenour Belkheïr. Le 12 Decembre 2008.