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Algérie - «L’interdiction d’importation des médicaments fabriqués en Algérie permettra de réaliser un gain de 200 millions d’euros»

importation de medicamentsDans cet entretien, le directeur général de la pharmacie auprès au ministère de la Santé, explique la nécessité, voire l’urgence, de surpasser la dépendance de l’étranger en ce qui concerne le médicament et de s’orienter vers une production nationale diversifiée et utile.

En tout et pour tout, il y a 4800 médicaments enregistrés au niveau de la direction pharmaceutique, dont 1400 sont produits localement par 57 entreprises pharmaceutiques.

Ces dernières ne fabriquent que 230 DCI (domination commune internationale) un total de 1063 DCI produites à l’échelle mondiale. Les laboratoires nationaux ne produisent que 160 DCI essentielles, soit 15% de la production nationale.

Le Gouvernement vient de prendre une batterie de mesures s’agissant de l’importation ainsi que la fabrication des médicaments. Cependant la liste arrêtée est encore méconnue... La liste des médicaments que nous avions arrêtée à la fabrication sera à la disposition de tous les concernés incessamment. Elle va être officialisée et publiée. C’est une liste que nous avons concoctée avec la collaboration des industriels du moins de leurs représentants.

Je rappelle qu’un comité de concertation a été installé par le ministère au mois de septembre dernier pour collaborer avec l’administration en ce qui concerne le médicament, sa promotion et le développement de l’industrie. Nous avons, avant même que les dispositions de protection ne soient prises par le Gouvernement, organisé ce cadre de concertation.

Pour ce qui est de la décision concernant l’interdiction d’importation des produits fabriqués en Algérie, je la qualifie d’importante. Non seulement elle favorise la production nationale, mais permet également de réduire la facture. En termes de valeur, cette opération va dans un premier temps nous permettre, selon nos estimation, de faire un gain de 200 millions d’euros pour l’an 2009. Des industriels contestent et déplorent le fait qu’ils n’ont pas été saisis dans toute cette opération.

Qu’en est-il exactement ? Je profite de cette occasion pour répondre à certains industriels qui se disent étonnés des nouvelles dispositions et ceux qui se sentent floués parce que nous ne les avons pas intégrés dans la réflexion. Je tiens à rappeler que le 29 juillet dernier, nous avons réuni l’ensemble des industriels et nous leur avions demandé de désigner leurs représentants car nous ne pouvons pas organiser à chaque fois des assemblées générales. Au mois de septembre, nous n’avions reçu aucune proposition.

Pourtant, nous avions averti qu’en absence de celles-ci, nous inviterons un certain nombre d’industriels pour composer le comité de concertation. Ce que nous avions fait. Nous avons pris la précaution d’intégrer les présidents des trois organisations professionnelles d’industrielles à savoir le président de l’UNOP, celui du SAIP et le président de l’ANPP. Le comité est composé, en tout, de 9 représentants.

Cela étant, nous ne pouvons pas dire que les organisations professionnelles n’ont pas été intégrées. Suite à nos réunions, nous avons arrêté un certain nombre de dispositions qui s’inscrivent dans le même sillage que les nouvelles orientations du Gouvernement.

Ainsi, dans le nouveau cahier des charges, nous avons intégré toutes les propositions de ce comité de concertation. Je reviens à la liste des médicaments pour dire qu’elle a été concoctée avec le comité de concertation sur la base de la liste globale des médicaments fabriqués en Algérie. En tout, il y a 289 DCI. Là où la production nationale satisfait les besoins exprimés, nous avons arrêté l’importation du produit.

Là où le produit ne satisfait que partiellement les besoins du marché, nous avons décidé d’importer un stock stratégique de sécurité parce que ce qui nous importe en premier lieu c’est le malade. Notre priorité est de protéger le malade avant de protéger l’industriel. Cette protection a un double but. D’abord diminuer l’enveloppe financière de l’importation qui est importante.

En 2007, la facture a été de l’ordre de 1 milliard 300 millions d’euros en ce qui concerne les produits pharmaceutiques, dont 800 millions ont été dégagés pour le médicament. Et selon nos provisions, je pense qu’à la fin de cette année, la facture sera relativement supérieure par ce que l’année 2008 a vu 37% en moins des transferts des malades à l’étranger et automatiquement il y a une enveloppe de médicaments qui est en plus. Deuxièmement, l’Etat avait augmenté la part de l’oncologie dont les produits sont excessivement chers pour une meilleure prise en charge.

Pour 2008, une enveloppe de 19 milliards de dinars exclusivement réservée aux cancéreux et aux maladies orphelines, troisièmement, nous avons relancé les implantologies, c'est-à-dire les greffes et ces dernières soumettent le malade à une médication permanente sans oublier les médicaments d’anti-rejet qui sont également excessivement chers. Faut-il déduire que c’est dans cette optique que s’inscrit la révision de la nomenclature nationale de médicaments ?

En effet, nous sommes en train de réunir la commission nationale de la nomenclature pour «toiletter» le Codex de médicament, c'est-à-dire la liste de tous les produits pharmaceutiques enregistrés en Algérie. Actuellement nous avons 4800 médicaments enregistrés et sur ces produits, fatalement il y a des médicaments qui sont de grand intérêt et d’autres non. Il y a aussi des médicaments qui sont retirés par des laboratoires. Il y a des produits que nous avons nous-mêmes retirés dans le cadre de la pharmacovigilance.

Ce qui a donc nécessité de revisiter la nomenclature nationale des médicaments pour qu’elle soit adaptée à la réalité du terrain et surtout aux produits réellement commercialisés. Cette opération n’est pas particulière, c’est un travail de routine. Le travail est donc permanant, il relève exclusivement de l’administration. Celle-ci intervient pour retirer un médicament quant il s’agit d’un problème de pharmacovigilance.

Le retrait peut se faire également par les industries quand tel ou tel laboratoire ne fabrique plus un produit alors qu’il est enregistré en son nom et à ce moment-là, nous intervenons en le retirant pour que le prescripteur sache que ce dernier n’existe plus sur le marché. Une fois établie, la nomenclature sera sur le site du ministère de la Santé. L’industrie pharmaceutique en Algérie est peu diversifiée, elle est faible en matière de valeur ajoutée; pourquoi ?

Dès lors que nous passons à la protection de l’industrie, l’objectif primordial est la réduction de la facture financière ainsi que la dépendance de l’étranger. Il faut que tous les produits que nous importons soient fabriqués tôt au tard chez nous. L’erreur que nous avions commise c’est d’avoir autorisé à tout le monde de fabriquer le même produit. C’était une industrie balbutiante. L’heure est venue pour mettre de l’ordre. Nous avons heureusement une vingtaine d’industriels qui sont d’un niveau international.

Ce qui fait qu’aujourd’hui nous avons l’outil de production. L’objectif est d’aller vers un investissement réel. En somme, tous les produits fabriqués seront protégés pour éviter le duplicata inutile et il va y avoir une liste de produits essentiels du ministère de la Santé qui sera proposée aux fabricants. Aujourd’hui nous fabriquons 34% de nos besoins, c’est insignifiant, et seulement 15% des produits sont essentiels. Avec les nouvelles dispositions, nous ambitionnons d’arriver en 2012 au moins à 65% de nos besoins et 50% en produits essentiels. Quand le marché est réservé à la production nationale, tout le monde sera intéressé de développer cette industrie pour ne pas être doublé par l’importation.

Si l’outil national ne répond pas, nous serons obligés d’en importer. Or, il y va de l’industrie algérienne si elle veut prospérer et exister. Elle est obligée de s’améliorer, donc de s’élargir et pourquoi pas passer à la fabrication des produits essentiels et même des produits d’innovation.

Actuellement, nous ne fabriquons que du générique mais j’espère que demain il y aura des princeps algériens. Si cette industrie se développe, elle deviendra un terrain d’expérimentation pour l’université. Il faut réfléchir à la relation industrie-université. L’industrie est le moyen, l’université est le savoir et entre les deux, c’est la création.

Souvent on parle de pénurie de médicament, notamment ceux destinés aux cancéreux ; quelle est la situation actuellement ? Il n’y a jamais eu autant de médicaments anticancéreux introduits en Algérie que cette année. Maintenant s’il y a pénurie d’un produit de marque, c’est possible, mais il n’y a pas de pénurie de molécules de cancérologie. Je reviens pour dire que pour l’année 2008, l’Etat a consacré 19 milliards de dinars pour ces médicaments. Je m’explique.

Dans chaque DCI, il se pourrait qu’il y ait une dizaine de produits fabriqués par plusieurs firmes. Ce qui nous intéresse, c’est d’avoir une ou deux de ces DCI car nous ne sommes pas obligés d’importer toutes les marques. Nous avons pratiquement pour chaque DCI des doublures donc il y a toujours l’alternative. Ce qui est important aujourd’hui c’est de passer à la production.

Pour la cancérologie, par exemple, nous ne fabriquons aucun produit. Je vous annonce que pour cette année, nous avons deux entreprises qui se sont engagées à se lancer à partir du mois de mars dans l’oncologie. Une chose est certaine, quelle que soit la pathologie, nous trouvons toujours des palliatifs à toute rupture et nous faisons le maximum pour les éviter, à telle enseigne que nous avons des autorisations temporaires d’utilisation qui nous permettent en cas de manque, d’importer un médicament en urgence. Dans un délai d’une semaine, nous pouvons l’introduire. Cependant, je mentirais en disant qu’il n’y a pas eu de pénurie à un moment donné. Aucun pays au monde ne satisfait à 100% les besoins de son marché.

Je tiens également à rassurer que concernant la liste des médicaments bloqués à l’importation nous nous sommes assurés de la disponibilité au niveau du stock parce que obligation est faite à tous les laboratoires d’avoir un minimum de trois mois de stock. Obligation est faite que les produits importés, quand ils traversent la frontière algérienne, doivent leur rester les deux tiers de leur vie, ce qui nous évitera les ruptures mais surtout des produits périmés.

Synthèse de l'article - Equipe Algerie-Monde.com

D'apres Horizons-dz. www.horizons-dz.com. Par Wassilla Ould Hamouda. Le 12 Decembre 2008.

 

 

 

 

 

 

 

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