Liban : la hantise de la confrontation
Liban - La gigantesque marée humaine qui a investi les rues de Beyrouth vendredi dernier laissera-t-elle des séquelles sur la société libanaise ? Assurément oui. Jamais depuis que le dialogue inter-libanais a été interrompu, l’opposition n’avait été aussi virulente dans ses attaques antigouvernementales.
Renforcé depuis son triomphe sur l’armée israélienne en août dernier, le Hezbollah va désormais plus loin dans la confrontation en appelant ses sympathisants à s’immobiliser devant le siège du gouvernement. Bloqués depuis plus de trois jours à l’intérieur de l’enceinte du palais du gouvernement dans le centre-ville, le Premier ministre Fouad Siniora et nombre de ses ministres ne peuvent plus en sortir.
Des milliers de manifestants ont planté leurs tentes à l’extérieur du bâtiment, et promettent de ne pas les lever jusqu’à ce que le gouvernement présente sa démission au président de la République. Un président de la République vraisemblablement conforté dans ses positions, après la démonstration de force du Hezbollah et de ses alliés des courants de Michel Aoun et de Souleyman Frangie.
Emile Lahoud, pro-syrien jusqu’au bout des ongles, n’a jamais caché sa haine du Mouvement du 14 mars et de la majorité parlementaire.
Ardent défenseur de la suzeraineté syrienne sur son pays, le chef de l’Etat libanais a qualifié à maintes reprises le gouvernement actuel d’anticonstitutionnel. On se souvient des multiples couacs qu’il a eus avec son chef et nombre de ses membres, en plein Conseil des ministres. «Nous ne les laissons pas dormir, nous faisons du bruit pour les perturber. Nous avons assez d’énergie pour rester non pas un mois, mais un an ou deux», a affirmé hier soir fièrement, et sur le ton de la résolution un sympathisant du Hezbollah, à quelques mètres du siège du gouvernement.
Et pour ne rien arranger à la situation, le Premier ministre Fouad Siniora a reçu hier le soutien de Condoleezza Rice.
L’appui inopportun et opportuniste de la secrétaire d’Etat américaine n’est pas sans raviver la flamme de la discorde au pays du Cèdre. Accusé d’être le pion de l’Occident, le chef sunnite du gouvernement risque de faire monter la pression à son encontre. Et c’est peut-être le but recherché par Washington, spécialiste en la matière dans les tentatives de déstabilisation au Moyen-Orient.
Après d’innombrables tentatives pour exhorter les ministres chiites démissionnaires à réintégrer le gouvernement, le Hezbollah et le mouvement El Amel campent sur leurs positions et rejettent toute option excluant le départ du cabinet actuel.
En plus de l’agitation de Hassan Nasrallah, la sagesse de Nabih Berri n’a en rien permis de désamorcer la crise aiguë qui déchire la classe politique libanaise. La Syrie, quant à elle, jubilait en silence ou par presse interposée, jusqu’à ce qu’elle se prononce officiellement sur les événements que traverse sa voisine de l’Ouest.
«La Syrie soutient le peuple libanais et ses forces nationales qui ont fait front avec héroïsme à l’agression israélienne […], il faut respecter son choix à établir un gouvernement d’union nationale», a déclaré hier à Damas, Fayçal Mekdad, vice-ministre des Affaires étrangères. Près de deux années après le retrait total des troupes syriennes du Liban, l’ombre de Damas continue à être présente dans un pays dont l’ingérence occidentale et syrienne a fini par rendre l’avenir plus qu’incertain.
Par Mohamed Khaled Drareni - La Tribune, le 4 décembre 2006.
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